Référendum en Egypte : Les Frères Musulmans désavoués

Egypte : En se basant sur les chiffres officiels pour  un référendum bourré d’irrégularités,  on en arrive à ce chiffre : à peine un électeur sur cinq a approuvé le projet de constitution des Frères Musulmans et de leurs alliés salafistes.

Les Frères Musulmans au pouvoir ont organisé les 15 et 22 décembre 2012 un référendum pour tenter de trouver une légitimation à la constitution réactionnaire, liberticide et anti-ouvrière qu’ils cherchent à imposer au pays.

Manifestants anti-Morsi le 22 décembre au Caire

Basée sur la Charia comme source du droit, donnant de larges pouvoirs à l’armée  qui peut traduire des civils devant la cour militaire pour  « crimes de nature à nuire aux forces armées », cette constitution remet en cause la liberté d’expression et les libertés syndicales. Il s’agit très clairement d’une constitution visant, par le sabre et le goupillon, à écraser les luttes de la classe ouvrière et les acquis de la révolution de 2011.

Ce 23 décembre, les réactionnaires des Frères Musulmans hurlent qu’ils ont gagné ce référendum et que leur constitution serait légitime. Mais quelle légitimité ?

Le scrutin, selon les normes démocratiques bourgeoises, s’est déroulé avec de nombreuses irrégularités et des violences des partisans de Morsi. A Minieh, en Moyenne-Egypte où vit une forte minorité chrétienne suspectée de voter « non » à une constitution basée sur la Charia, de nombreuses pressions ont eu lieu pour empêcher le vote des chrétiens. Le vote des chrétiens était intentionnellement ralenti dans les villes, ou tout simplement interdit dans des villages, par des islamistes. Pour les femmes, on a noté dans toutes les villes que les files féminines avançaient beaucoup moins vite que celles des hommes.

Les femmes en effet auraient aussi plutôt tendance à dire « non » à une Constitution qui risque de les priver de droits acquis de haute lutte : celui de pouvoir demander le divorce pour incompatibilité, et celui de garder le domicile conjugale si la femme répudiée a des enfants en bas âge. Plusieurs cas d’agressions contre des femmes non voilées par des femmes en niqab ont été signalés. Les forces de l’ordre ne sont pas intervenues, sous prétexte que cela avait eu lieu hors de l’enceinte des bureaux de vote.

Au delà des pressions, avec des juges en grève, le seul contrôle des élections était celui des ONG, or, si bien des organisations historiques des droits humains se sont vu refuser le permis d’observer les élections, près de 10.000 nouveaux permis ont été distribués à des organisations fraîchement crées par les Frères Musulmans. Pour décrire le contexte du référendum, le directeur du centre des droits de l’homme du Caire a parlé de « référendum à la Moubarak ».

Les Frères Musulmans n’ont bien sûr pas ménagé leurs efforts et de mobiliser leurs réseaux pour faire approuver la constitution. A Gizeh,  une banderole sur la mosquée Zaki Bacha indiquait «Naâm li doustouri Masr» (oui à la Constitution de l’Egypte), sur une la mosquée Mohamed Ramadhane,  une large affiche indique «Le peuple veut la charia», et explique aux fidèles les vertus de la Constitution. Des propagandistes de la confrérie réactionnaires vont jusqu’à promettre les flammes de l’enfer à celles et ceux qui ne voteraient pas « oui » à leur constitution.

Et pourtant ! Les chiffres, même falsifiés, des Frères Musulmans montrent que la majorité de la population égyptienne n’adhère pas à ce projet de constitution réactionnaire. Vu la farce de ce référendum dont le seul but était de chercher à donner un semblant de légitimité au régime de Morsi, la plupart des opposants ont appelé au boycott du référendum.

Or, selon les chiffres officiels, la participation a été de 32% ! C’est à dire 68% d’abstention ! Et c’est là une moyenne, à Assouan, il y a eu 86% d’abstention et à Assiout 72%.

Ce dimanche matin, les Frères Musulmans annonçait leur victoire avec 56% de voix favorables à leur constitution… ce qui fait, en prenant en compte l’abstention, que… 17,92 % des électeurs d’Egypte favorables à leur constitution.  Le chiffre a dû sembler trop faible, et dans l’après-midi les 56% d’électeurs favorables se sont transformés en 64%… soit 20% des électeurs d’Egypte.

En clair et en se basant sur les chiffres officiels, avec un référendum bourré d’irrégularités,  on en arrive à ce chiffre : à peine un électeur sur cinq a approuvé le projet de constitution des Frères Musulmans et de leurs alliés salafistes !

La constitution que veulent imposer les réactionnaires n’a pas la moindre légitimité. Cela n’arrêtera probablement pas Morsi, les militaires et leurs sbires pour chercher à imposer leur régime… mais la population, et en particulier la classe ouvrière, est bien loin d’avoir dit son dernier mot.

Une réponse à “Référendum en Egypte : Les Frères Musulmans désavoués

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