Espagne : Pompiers et serruriers refusent les expulsions

L’Indépendant, 22 février 2013 :

Pompiers et serruriers ont rejoint cette semaine le mouvement social contre les expulsions de propriétaires surendettés en Espagne, une question très sensible dans l’opinion publique notamment après le suicide de plusieurs personnes qui ne pouvaient faire face à leurs dettes. Ces derniers jours, les pompiers de plusieurs régions, ainsi que l’Union des serruriers, ont refusé de répondre à des ordres de la justice qui leur demandaient d’ouvrir les portes de logements pour en expulser les occupants. « On ruinait la vie des familles et on nous transformait en bourreaux. Cela nous mettait très mal à l’aise et nous avons décidé de ne plus participer à cela », a expliqué à l’AFP David Ormaechea, le président de l’Union des serruriers. « Il ne s’agit pas de désobéissance civile », a-t-il ajouté.

Mardi, dans la ville de La Corogne en Galice, dans le nord-ouest de l’Espagne, face au refus d’un serrurier, la police a fait appel aux pompiers pour ouvrir la porte de l’appartement d’une femme de 85 ans qui n’avait pas payé son loyer. Mais les pompiers, arrivés sur les lieux accompagnés de dizaines de militants anti-expulsions, ont à leur tour refusé d’ouvrir la porte et quelques-uns se sont mêlés aux manifestants. Dans la foulée des pompiers galiciens, ceux d’autres régions comme la Catalogne et Madrid ont annoncé qu’ils refusaient de participer désormais aux expulsions. « Nous portons secours aux personnes en danger. C’est une contradiction d’aider les banques qui vont jusqu’à mettre en danger la vie des personnes », a affirmé à l’AFP Antonio del Rio, représentant syndical des pompiers de Catalogne.

Depuis l’éclatement de la bulle immobilière en 2008, de nombreuses familles qui s’étaient lourdement endettées, profitant de conditions de crédit faciles, ne peuvent plus faire face à leurs échéances. Les expulsions se sont alors multipliées: depuis 2008, 350.000 ordres d’expulsions, visant des résidences principales mais aussi secondaires ainsi que des espaces commerciaux, ont été lancés par les banques, selon les chiffres officiels, dont environ la moitié ont été exécutés, selon la presse. Face aux drames humains devenus quotidiens, l’opinion publique s’est largement mobilisée, et une initiative citoyenne réclamant l’arrêt des expulsions, ainsi que l’effacement des dettes des propriétaires concernés, a recueilli 1,4 million de signatures. Les députés espagnols ont accepté le 12 février de débattre de cette initiative qui pourrait déboucher sur une loi, le Parti populaire, de droite, qui dirige le pays, ayant accepté d’en discuter.

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