Lettre d’Asqar Karimi, au nom du Parti Communiste-Ouvrier d’Iran, à Guy Ryder, Directeur Général de l’OIT.
A : Guy Ryder, Directeur Général de l’Organisation International du Travail (OIT)
Copie à : Tous les syndicats et participants à la conférence annuelle de l’OIT à Genève
Cher Monsieur Ryder,
Savez-vous que peu avant le début de la conférence annuelle de l’OIT, 17 ouvriers d’une mine d’or en Iran ont été fouettés publiquement sur décision d’un des tribunaux de la République Islamique d’Iran ? L’ordre de flagellation était basé sur une plainte de l’employeur, la mine Arg Darreh à Tekab à l’Ouest de l’Iran, et de l’unité de sécurité et de renseignement (Herasat) de la mine, accusant ces travailleurs d’avoir protester contre les licenciements. Chaque travailleur a reçu entre 30 et 100 coups de fouet.
Ce n’est pas la première fois que des travailleurs sont condamnés à la flagellation en Iran. Seddiqh Amjadi, Fares Gavilianand et Habib Kalakani ont été fouettés en février 2007 pour avoir participé aux manifestations du 1er Mai. La peine à 37 coups de fouet contre Siavash Eslami a été exécutée en août 2012 suite à la décision du Tribunal Islamique de Sary. Vous aviez été informé de tous ces exemples au moment des faits. Les victimes des flagellations ne sont pas que des ouvriers. Des femmes sont fouettées encore et toujours pour ne porter le hidjab islamique, et encore hier, le 26 mai 2016, 35 jeunes diplômés, garçons et filles, ont été condamné chacun à 99 coups de fouet après avoir été accusé d’avoir fêté ensemble, dans la mixité, leurs diplômes et d’avoir consommé de l’alcool.
Vous connaissez l’histoire de la répression systématique du mouvement ouvrier et de l’arrestation des dirigeants ouvriers en Iran pour tentatives de constituer des organisations indépendantes du gouvernement et pour avoir organisé des grèves et manifestations contre la pauvreté et l’absence de droits. Vous savez que de nombreux dirigeants enseignants et ouvriers sont en prison, condamnés à de lourdes peines, pour avoir dénoncé des salaires qui ne sont qu’à un quart du niveau de pauvreté officiel. Un nombre important de militants ouvriers ont été condamné à des peines de prison ferme et purgent actuellement leurs peines.
La question ici est celle de la plus cruelle exploitation des ouvriers en Iran et de leur privation du droit de s’organiser et de protester, voilà la dure réalité des travailleurs en Iran. Nous voulons mettre en lumière ces faits que l’Etat auquel les représentants participent à la conférence est cet Etat qui va jusqu’à condamner des ouvriers, des enseignants et des jeunes à la flagellation pour les humilier, briser leur dignité et aussi les empêcher de construire des organisations indépendantes du gouvernement. Cet exemple de condamnations à des peines de flagellation à l’encontre d’ouvriers, d’enseignants et de jeunes montrent que ceux qui se participent à la conférence de l’OIT sous le nom de « représentant des travailleurs d’Iran », non seulement ne font rien pour organiser les travailleurs face à la violente répression, mais sont des agents et des organisations anti-ouvriers construits par le gouvernement, bref en réalité des organisations gouvernementales.
Une question à vous Monsieur Ryder : n’est-ce pas trop dur pour vous de participer à une conférence avec des représentants d’un tel régime ? Voyez-vous vraiment une différence entre ce gouvernement et Daesh ? Les dirigeants d’un tel régime ne devraient-ils pas être jugés pour leur répression quotidienne des travailleurs et de la population plutôt que de participer au sommet de l’OIT ?
Cette année, plus encore que les années précédentes, les ouvriers et les enseignants en Iran observent votre réaction aux « accusations d’atteinte à la sécurité nationale » que portent le régime pour répondre à la moindre protestation ouvrière par l’arrestation et l’emprisonnement des dirigeants ouvriers. Ils attendent de voir votre réaction à la mort du militant ouvrier Shahrokh Zamani et aux longues peines de prison à l’encontre de travailleurs et d’enseignants dont Behnam Ebrahimzadeh, Esmail Abdi, Mohammad Jarrahi and Jafar Azimzadeh. Ils attendent de voir votre réaction au comportement moyen-âgeux de la République Islamique à l’encontre des travailleurs et de la population.
Vous avez déjà reçu de nombreuses lettres de militants ouvriers emprisonnés, dont les lettres de Jafar Azimzadeh, Esmail Abdi et Behnam Ebrahimzadeh, des lettres des épouses des travailleurs emprisonnés et des lettres des organisations ouvrières. Nous attendons des représentants des organisations syndicales participantes à la conférence qu’elles défendent les droits fondamentaux et les revendications de la classe ouvrière en Iran et demandent l’expulsion d’un tel gouvernement barbare de l’Organisation Internationale du Travail.
Salutations,
Asqar Karimi, pour le Parti Communiste-Ouvrier d’Iran, 27 mai 2016