Article publié par l‘Initiative Communiste-Ouvrière :
Un slogan fleurit dans nos manifestations, celui de « séparation du MEDEF et de l’Etat ». Il n’y a en effet pas besoin de faire de longs développements pour démontrer que, de droite comme de gauche, les gouvernements successifs ne sont que les serviteurs du patronat. Si, ces dernières années, faute de rapport de force significatif permettant d’imposer des revendications ouvrières, cela est particulièrement visible, ce n’est pas nouveau.
Le MEDEF aujourd’hui s’appelait hier CNPF ou avant-hier Comité des Forges, et au-delà des noms de l’organisme patronal, c’est bien la bourgeoisie, c’est-à-dire la classe qui détient les moyens de production, qui tient et ce depuis plus de deux siècles, les rênes du pouvoir d’Etat en France. La révolution française de 1789 a incontestablement eu aussi un caractère populaire et a même pu avec Babeuf élaborer un programme proto-communiste. Mais la classe qui a pris le pouvoir et remplacé ainsi la vieille aristocratie féodale, c’est bien la bourgeoisie. La première loi sur le travail fut d’ailleurs la loi Le Chapellier qui interdisait toute forme d’organisation ouvrière. Quant à l’instauration définitive de la république en France, elle s’est faite sur les cadavres de la Commune de Paris de 1871.
L’Etat, pour reprendre la formule de Marx, c’est avant tout « un groupe de gars armés », c’est-à-dire l’organisme qui détient le monopole de la violence légale. On peut retracer son histoire ces deux derniers siècles, de la semaine sanglante à Fourmies, de Jules Moch aux discussions sur la mobilisation de l’armée en Mai 1968, et force est de constater que cette violence légale, à chaque fois que la lutte des classes devenait aiguë, s’est tournée contre la classe ouvrière. Bien sûr, on ne saurait nier que durant toutes ces années, les travailleuses et les travailleurs ont arraché bien des conquêtes. Des huit heures aux congés payés en passant par la retraite, chaque fois cela a été au prix de bien des grèves, bien des manifestations et bien des luttes. Et comme la lutte des classes ne s’arrête jamais, à chaque fois que la classe ouvrière a baissé la garde, à chaque fois qu’elle s’est démobilisée, la bourgeoisie, et les politiciens à son service, en profitent pour les remettre en cause. C’est vrai à l’échelle de la société comme à l’échelle d’une boîte.
L’Etat n’est pas, n’a jamais été et ne sera jamais un organisme neutre, « au-dessus des classes ». La séparation du MEDEF et de l’Etat, signifie que ce soit une autre classe qui se saisisse du pouvoir, et il n’y en a qu’une, la classe ouvrière, c’est-à-dire la classe de celles et ceux qui, dépourvus de propriété privée, sont obligé de vendre leur force de travail pour survivre, ce que Marx et Engels appelaient les prolétaires. Cette classe ne saurait prendre le pouvoir politique, le pouvoir d’Etat, sans prendre aussi le pouvoir économique. Il s’agira alors d’exproprier la bourgeoisie, de réorganiser toute l’économie pour mettre les formidables ressources dont nous disposons non plus au service d’une minorité de riches mais de l’humanité toute entière, d’abolir à la fois le despotisme de l’atelier et le chaos du marché. Bien sûr, les patrons et les actionnaires ne se laisseront pas faire, il faudra les forcer, et donc disposer d’un Etat, tout en abolissant l’armée permanente, la bureaucratie, en imposant la révocation des élus et en limitant leurs revenus au revenu ouvrier moyen, en quelques mots le programme qui fut celui de la Commune de Paris. A la république bourgeoise, forme actuelle de l’Etat bourgeois en France, il s’agira d’opposer la république des conseils ouvriers. Alors seulement, on pourra dire qu’il y a séparation du MEDEF et de l’Etat, et même plus puisque le communisme, dès lors qu’on aura écarter tout risque de retour à l’ordre capitaliste, c’est par l’abolition de la société de classes aussi l’abolition de cette machine monstrueuse qu’est l’Etat.