Une histoire de 8 mars… 2011

Texte publié par l’Initiative Communiste-Ouvrière :

En France, le 8 mars se limite dans bien des villes de province à des cérémonies officielles à la mairie. Et voilà une histoire vraie, survenue dans une petite ville de province en ce début mars, très loin des cérémonies officielles.

Cela concerne une femme, mais cela pourrait en concerner des milliers, des dizaines de milliers comme elle. Femme, ouvrière non qualifiée et immigrée, sa seule richesse, son seul moyen de gagner sa vie, c’est de vendre sa sueur et son travail. Et son travail, elle le vend dans un secteur où elles sont en grande majorité des femmes, et bien souvent immigrées, un secteur avec très peu de présence syndicale, un secteur où les patrons profitent que ces travailleuses ont parfois du mal à comprendre le français et à connaître leurs droits : le secteur du nettoyage. Temps partiel imposé, salaires au lance-pierre, mépris des chefs, isolement des ouvrières dans différents petits chantiers, ce sont elles qui, avant qu’ouvrent les bureaux, les magasins et les administrations, ou après qu’ils ferment, les lavent. Bref un des secteurs où l’exploitation capitaliste est la plus dure, et où elle est intimement liée au racisme et au sexisme.

Comme souvent dans ce secteur, le chantier où travaille cette ouvrière est repris par une autre boîte. La convention collective des entreprises du nettoyage, qui ne garantit pourtant pas beaucoup de droits aux travailleuses et travailleurs de ce secteur, impose quand même que dans ce cas l’entreprise qui reprend le chantier doit garder les ouvrières et ouvriers. Bien sûr, cette garantie n’interdit pas des licenciements futurs, mais que de démarches pour un patron, et en plus cela lui imposerait de payer une prime de licenciement qui, dans le cas de cette ouvrière s’éleverait quand même à la somptueuse somme de 600 euros ! Et comme le dit bien la morale capitaliste, un sous est un sous, et un sous de moins dans la poche d’une ouvrière c’est un sous de plus dans celle du patron. Alors ? Pourquoi s’embêter avec une procédure de licenciement ? Autant trouver un prétexte bidon pour dire à l’ouvrière que c’est fini pour elle, qu’elle ne sera pas reprise, et lui proposer, royalement, avec toute la bonté dont sait faire preuve un patron face à une ouvrière immigrée, de signer un CDD de 15 jours qui annulerait son CDI. Une ouvrière, une femme, une immigrée,… dans la tête du patron, elle ne pouvait que accepter cette proposition. Si bien sûr, un ouvrier, quelque soit son sexe, par sa condition de travailleur salarié doit quotidiennement faire face aux mauvais coups des patrons, lorsque l’ouvrier est une ouvrière immigrée, s’ajoute à l’exploitation capitaliste l’oppression machiste et le mépris raciste.

L’histoire aurait pu s’arrêter là. Et dans le secteur du nettoyage, comme dans d’autres secteurs où l’on subit les pires conditions de l’exploitation capitaliste, il est vrai qu’elle s’arrête parfois là. Sauf que cette fois, l’histoire de s’arrête pas là. L’ouvrière refuse la proposition du patron, on l’empêche de retourner sur son chantier, elle fait appel à des camarades et on va se battre pour faire respecter ses droits.

Dans cette petite ville de province, à part les cérémonies officielles de la mairie, rien n’est prévu pour le 8 mars. Sur que, à la mairie, il y aura de beaux discours sur l’action du maire pour promouvoir l’égalité, même si il ne serait pas étonnant que des ouvrières de cette même boîte de nettoyage ou d’une boîte similaire laveront, après les discours et les petits fours, la salle officielle. Pas de manifestation prévue pour le 8 mars, mais on aura à faire, vers l’inspection du travail et ailleurs, pour préparer la défense des droits de cette ouvrière et au-delà, des autres travailleuses de cette entreprise et de ce secteur.

Et cette histoire somme toute banale en système capitaliste est là pour rappeler que, même en France, il reste bien des luttes à mener pour l’égalité, que ces luttes ne se mènent pas dans les salons confinées des cérémonies officielles ou dans des meetings entre convaincues des colloques universitaires, mais avant tout là où se trouve l’exploitation capitaliste la plus rude, et qu’elle est pleinement liée au combat quotidien de la classe ouvrière.

Camille Boudjak, 7 mars 2011

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